[LCM Articles] Amin Maalouf Occident et Monde arabo-musulman

Alberto Haddad albertohaddad at yahoo.com
Wed May 23 09:49:48 EDT 2007


>> 	Monsieur le Président,
>>
>> 	Excellences,
>>
>> 	Mesdames et Messieurs,
>>
>> 	Chers amis,
>>
>>
>>
>> 	J'ai très peu l'habitude de prendre la parole devant de hauts 
>> responsables politiques, même si nous avons à Paris une tradition 
>> bien établie de déjeuners informels à l'Élysée, comme dans les 
>> principaux ministères, où des romanciers, des compositeurs, des 
>> philosophes ou des metteurs en scène sont invités à exprimer 
>> librement leurs opinions, et à réfléchir ensemble à voix haute.
>>
>> 	Je garde notamment en mémoire un repas au ministère des Finances, il

>> y a quelques années. Nous étions cinq ou six autour du ministre et de 
>> son épouse, et certains convives avaient sévèrement critiqué les 
>> résultats économiques du gouvernement. Le ministre avait écouté 
>> patiemment, puis, à un moment, il avait posé sa fourchette pour dire 
>> : « Je vais être franc avec vous. En tant que ministre, le mieux que 
>> je puisse faire, c'est d'empêcher la situation dans mon pays de se 
>> détériorer. Il y a une conjoncture internationale, et même si je 
>> prenais les meilleures décisions, même si je ne commettais aucune 
>> erreur, les résultats que je pourrais obtenir ne seraient jamais 
>> meilleurs que ce que la conjoncture me permet. En revanche, si je 
>> commettais des erreurs graves, alors la situation de mon pays s'en 
>> trouverait significativement dégradée. ».
>>
>> 	Ce caractère ingrat de l'action politique pourrait s'appliquer 
>> également à la question qui nous préoccupe ce matin. Les relations 
>> entre l'Occident et le Monde arabo-musulman sont tellement 
>> désastreuses au niveau global que même si l'on faisait la meilleure 
>> politique d'immigration, certains aspects du problème continueraient 
>> à nous échapper. Cependant, il y a au moins deux excellentes raisons 
>> pour agir dans ce domaine, et pour le faire judicieusement. La 
>> première, c'est qu'il faut évidemment empêcher le climat délétère qui 
>> sévit au niveau global de se répercuter à l'intérieur de nos pays ; 
>> si on ne le faisait pas, ou si on le faisait mal, cela pourrait avoir 
>> des effets dévastateurs sur la paix civile, sur les institutions 
>> démocratiques, comme sur les valeurs fondamentales de nos sociétés. 
>> Comment nous protéger efficacement sans nous aliéner des populations 
>> entières et sans nous détourner de nos propres valeurs morales ? 
>> Chacun sait que la chose n'est pas simple, mais nul ne peut se 
>> permettre d'ignorer cette question, ou d'y répondre avec légèreté...
>>
>> 	La seconde raison qui devrait nous inciter à réfléchir et à agir est

>> plus ambitieuse ; il ne s'agit plus de limiter les retombées 
>> négatives de la réalité globale sur notre situation intérieure, mais 
>> d'essayer de créer, dans nos pays, un nouveau modèle de coexistence 
>> qui pourrait un jour influer positivement sur le reste du monde. Il 
>> va de soi que la gestion de la diversité culturelle est, de toute 
>> manière, une exigence incontournable de la construction européenne ; 
>> faire coexister ensemble, de manière harmonieuse et féconde, des 
>> peuples ayant des langues différentes, des traditions différentes, 
>> des parcours historiques souvent antagonistes, c'est la vocation de 
>> l'Europe contemporaine, c'est le défi qu'elle s'est donnée pour 
>> mission de relever. La difficulté supplémentaire pour notre 
>> génération sera de concevoir un modèle de coexistence qui permette 
>> d'inclure les populations qui portent des cultures non-européennes. 
>> C'est, comme je viens de le dire, ambitieux, peut-être exagérément 
>> ambitieux, mais quand on y réfléchit, ici, en Europe, se trouve le 
>> seul environnement humain à peu près contrôlable où une telle 
>> expérience pourrait être tentée. Si la coexistence entre les porteurs 
>> des diverses langues et des diverses croyances ne réussit pas dans le 
>> cadre de l'Europe, c'est qu'elle ne réussira nulle part, et nous 
>> devrons alors laisser à nos enfants et à nos petits-enfants un 
>> héritage de violence et de haine sans fin ; à l'inverse, si 
>> l'expérience réussit dans le laboratoire de l'Europe, alors peut-être 
>> pourrons-nous proposer un modèle à d'autres régions du monde, qui en 
>> ont cruellement besoin et qui sont manifestement incapables de le 
>> mettre en ¦uvre.
>>
>>
>>
>> 	Je ne m'attarderai pas sur les origines du contentieux historique 
>> entre l'Occident et le Monde arabo-musulman. C'est là une question 
>> qui me préoccupe depuis toujours, puisque je suis né à la frontière 
>> entre ces deux univers culturels, avec un pied sur chaque rive, et 
>> que mon premier livre, publié il y a un quart de siècle, avait pour 
>> thème les croisades. Mais je dois confesser, sur ce chapitre, une 
>> certaine lassitude. Je ne crois plus à la vertu apaisante des 
>> explications historiques. Elles sont généralement l'occasion pour les 
>> uns et les autres de mettre en avant leurs préjugés et leurs 
>> récriminations. Les voix conciliatrices se perdent sous les cris de 
>> vengeance ; et, en ce qui me concerne, je finis par me draper dans le 
>> silence pour préserver ma sérénité. Il ne faudra pas compter sur moi, 
>> en tout cas, pour raconter que les religions prônent la tolérance, et 
>> que toutes les violences que nous observons relèvent d'un regrettable 
>> malentendu. Nous vivons une époque de communautarisme global 
>> pernicieux, sanglant et destructeur ; il serait absurde de le nier, 
>> mais il serait irresponsable de s'y résigner ; considérer « le choc 
>> des civilisations » comme l'état normal des relations entre les 
>> diverses composantes de l'humanité, c'est accepter que le monde 
>> devienne ingouvernable, qu'il sombre dans le chaos, la violence 
>> aveugle, et la régression morale. Comment pourrions-nous faire face 
>> aux formidables périls qui nous menacent - la prolifération des armes 
>> biologiques, chimiques ou nucléaires, l'épuisement des ressources 
>> naturelles, les perturbations climatiques - si le monde est livré à 
>> la confrontation vicieuse entre les grands ensembles religieux et 
>> culturels ? Sortir de cette logique destructrice n'est pas une option 
>> parmi d'autres, c'est une exigence de survie pour l'humanité tout 
>> entière.
>>
>>
>>
>> 	L'un des aspects de cette confrontation entre l'Occident et le Monde

>> arabo-musulman, c'est que tous les événements sont systématiquement 
>> interprétés de manière différente, et même quasiment opposée, selon 
>> qu'on se trouve dans un camp ou dans l'autre. Nous sommes 
>> manifestement en présence de deux interprétations de l'Histoire, 
>> cristallisées autour de deux perceptions de « l'adversaire ». Pour 
>> les uns, l'islam se serait montré incapable d'adopter les valeurs 
>> universelles prônées par l'Occident ; pour les autres, l'Occident 
>> serait surtout porteur d'une volonté de domination universelle à 
>> laquelle les musulmans s'efforceraient de résister avec les moyens 
>> limités qui leur restent.
>>
>> 	Pour qui peut écouter chaque « tribu globale » dans sa langue, ce 
>> que j'ai l'habitude de faire depuis de longues années, le spectacle 
>> est à la fois édifiant, fascinant et affligeant. Car, à partir du 
>> moment où l'on pose certaines prémisses, on peut parfaitement 
>> interpréter tous les événements sans éprouver le besoin d'écouter la 
>> version adverse.
>>
>> 	Si, par exemple, on acceptait le postulat selon lequel l'une des 
>> calamités de notre époque serait « la barbarie du Monde arabe », 
>> l'observation de l'Irak ne pourrait que conforter cette impression. 
>> Un tyran sanguinaire qui a régné par la terreur pendant un tiers de 
>> siècle, saigné son peuple, dilapidé l'argent du pétrole en dépenses 
>> militaires ou somptuaires ; qui a envahi ses voisins, défié les 
>> puissances, multiplié les vantardises, sous les applaudissements 
>> admiratifs des foules arabes, avant de s'écrouler sans véritable 
>> combat ; puis, dès que l'homme est tombé, voilà que le pays sombre 
>> dans le chaos, voilà que les différentes communautés commencent à 
>> s'entre-massacrer comme pour dire : voyez, il fallait bien une 
>> dictature pour tenir un tel peuple !
>>
>> 	Si, à l'inverse, on adoptait comme axiome « le cynisme de l'Occident

>> », les événements s'expliqueraient de manière tout aussi cohérente : 
>> en prélude, un embargo qui a précipité tout un peuple dans la misère, 
>> qui a coûté la vie à des centaines de milliers d'enfants, sans jamais 
>> priver le dictateur de ses cigares ; puis une invasion, décidée sous 
>> de faux prétextes, sans égard pour l'opinion ni pour les 
>> organisations internationales, et motivée, au moins en partie, par la 
>> volonté de mettre la main sur les ressources pétrolières ; dès la 
>> victoire militaire, une dissolution hâtive et arbitraire de l'armée 
>> irakienne et de l'appareil d'État, et l'instauration explicite du 
>> communautarisme au c¦ur des institutions, comme si l'on avait choisi 
>> de plonger le pays dans l'instabilité permanente ; en prime, la 
>> prison d'Abou-Ghraib, les humiliations incessantes, les « dommages 
>> collatéraux », les innombrables bavures impunies...
>>
>> 	Pour les uns, l'exemple de l'Irak démontre que le Monde arabe est 
>> imperméable à la démocratie ; pour les autres, le même exemple 
>> dévoile le vrai visage de la démocratisation à l'occidentale. Même 
>> dans la mort filmée de Saddam Hussein, on pourrait voir aussi bien « 
>> la barbarie des Arabes » que « l'arrogance de l'Occident ».
>>
>> 	De mon point de vue, les deux discours sont justes, et les deux sont

>> faux. Chacun tourne dans son orbite, devant son public, qui le 
>> comprend à demi-mot, et qui ne veut pas entendre le discours des « 
>> autres ». Je suis censé, par mes origines, par mon itinéraire, me 
>> réclamer de ces deux mondes à la fois, mais je me sens chaque jour un 
>> peu plus éloigné de l'un comme de l'autre.
>>
>> 	Le fond de ma pensée, c'est que tous deux se trouvent dans une 
>> impasse historique sans précédent. Le monde arabo-musulman est en 
>> proie à une régression matérielle et morale, englouti dans le 
>> désespoir, sans aucune vision de l'avenir. Il n'a su répondre à aucun 
>> des défis de l'Histoire, et il se trouve aujourd'hui totalement 
>> désemparé, et désaxé. Il est peu probable qu'il sorte bientôt de son 
>> cauchemar, qui est devenu le cauchemar du monde. Je suis sûr que l'on 
>> pourrait formuler la chose en des termes plus diplomatiques. Mais je 
>> n'en ressens pas vraiment la nécessité. Moi dont les ancêtres 
>> nomadisaient déjà dans le désert d'Arabie il y a quinze siècles, je 
>> ne me sens pas obligé d'utiliser, à propos des miens, un langage plus 
>> circonspect, je dis les choses comme je les vois. Ce que j'aime dans 
>> cette civilisation, ce sont les grandes heures de son passé, Cordoue, 
>> Grenade, Ispahan, Alexandrie, Constantinople, Samarcande. Aucun Arabe 
>> ni aucun Musulman n'aime le temps présent. Tous se sentent étrangers, 
>> égarés, orphelins, dans le monde d'aujourd'hui ; certains espèrent 
>> encore le réformer, d'autres ne songent plus qu'à le démolir.
>>
>> 	En comparaison, parler d'impasse à propos de l'Occident peut 
>> paraître très excessif. Son parcours historique demeure, 
>> incontestablement, la plus grande réussite de toute l'aventure 
>> humaine. Il a façonné le monde à son image, sa science est devenue la 
>> science, sa philosophie est devenue la philosophie, il a répandu sur 
>> la terre entière ses idées, ses principes, ses institutions, ses 
>> techniques, ses instruments... Et pourtant, il se trouve 
>> manifestement dans une situation délicate qui ressemble fort à une 
>> impasse. Parce qu'il semble de moins en moins capable de diriger le 
>> monde par la puissance douce, le soft power de l'économie et de 
>> l'autorité morale, et de plus en plus tenté de recourir à la 
>> puissance militaire ; quelquefois, il semble même embourbé dans une 
>> espèce de guerre coloniale planétaire dont il ne sortira ni perdant, 
>> ni gagnant.
>>
>> 	J'ai voulu être d'une grande franchise, et d'une certaine dureté, 
>> concernant l'expérience historique du Monde arabe ; je me dois de 
>> l'être tout autant avec celle de l'Occident. Son drame, aujourd'hui 
>> comme hier, et depuis des siècles, c'est qu'il a constamment été 
>> partagé entre son désir de civiliser le monde, et sa volonté de le 
>> dominer - deux exigences inconciliables. Il a diffusé partout ses 
>> principes de gouvernement, mais il s'est constamment retenu de les 
>> appliquer sincèrement hors de ses frontières. Les nations 
>> occidentales prônaient et pratiquaient la démocratie, l'égalité des 
>> chances, la liberté d'expression et l'état de droit, mais pas en 
>> Inde, pas en Algérie, pas en Uruguay, ni aux Philippines. Ce n'était 
>> pas là une banale inadéquation entre les promesses politiques et leur 
>> mise en application sur le terrain, c'était un abandon constant et 
>> systématique des idéaux proclamés, ce qui a eu pour résultat de 
>> susciter l'hostilité des élites asiatiques, africaines, arabes ou 
>> latino-américaines, et même très précisément l'hostilité des éléments 
>> qui croyaient le plus aux valeurs de l'Occident, ne laissant à ce 
>> dernier pour alliés que ceux qui, justement, s'accommodaient de la 
>> tyrannie, et qui étaient les éléments les plus rétrogrades des 
>> sociétés. A l'aube du XXIe siècle, certains d'entre nous se sont 
>> réveillés en sursaut pour se demander comment se fait-il qu'ils 
>> soient si sauvagement attaqués par ceux qui apparaissaient jusque-là 
>> comme des alliés, ou des protégés. La question est légitime, même si, 
>> à leur place, je l'aurais formulée autrement : comment se fait-il que 
>> nous nous soyons si longtemps alliés à des gens qui ne partageaient 
>> aucune de nos valeurs ?
>>
>> 	L'Occident a façonné le monde où nous vivons, il a porté la 
>> civilisation humaine à son sommet, matériellement et moralement. Sa 
>> tragédie historique, c'est qu'il a rempli la planète entière de ses 
>> enfants non reconnus. Il leur a transmis ses idées, ses techniques, 
>> ses langues, mais il n'a jamais franchi le pas supplémentaire qui 
>> leur aurait permis de s'identifier à lui, et qui lui aurait gagné 
>> leur fidèle adhésion. Au lieu de quoi, les élites modernistes du 
>> monde entier, et notamment celles de l'aire culturelle 
>> arabo-musulmane, ont dû s'épuiser dans des combats inutiles contre 
>> les puissances coloniales, puis contre les compagnies occidentales, 
>> et beaucoup se sont fourvoyés, par réaction, dans la voie sans issue 
>> du modèle soviétique, qui ne leur a apporté ni développement, ni 
>> libération nationale, ni démocratie, ni modernité sociale.
>>
>> 	On aurait pu s'attendre à ce que la chute du Mur de Berlin remette 
>> les pendules à l'heure. Cela ne s'est pas fait. Paradoxalement, ce 
>> qui aurait dû conduire à un triomphe définitif du modèle occidental, 
>> peut-être même à « la fin de l'Histoire », a produit l'effet inverse. 
>> Pour diverses raisons, que je ne pourrais toutes mentionner dans le 
>> cadre de cette brève introduction.
>>
>> 	L'une de ces raisons, c'est qu'avec la fin de la confrontation entre

>> communisme et capitalisme, on est passé d'un monde où les clivages 
>> étaient principalement idéologiques à un monde où les clivages 
>> étaient principalement identitaires, avec une forte composante 
>> religieuse. Pour cette raison, la civilisation occidentale, au moment 
>> même où elle aurait dû apparaître le plus largement universelle, est 
>> soudain apparue liée à une identité culturelle spécifique, et a été 
>> prise pour cible par ceux qui prônaient d'autres identités 
>> particulières.
>>
>> 	De plus, la puissance militaire de l'Occident n'a plus été perçue 
>> comme un contrepoids à la puissance soviétique, mais comme une force 
>> destinée à maintenir... à maintenir quoi, au juste ? Au nord d'une 
>> certaine ligne, on dira : à maintenir, au besoin par la force, la 
>> paix et la stabilité dans le monde ; au sud de cette ligne, qui fait 
>> le tour de la terre en passant notamment par le détroit de Gibraltar, 
>> et en longeant le Rio Grande, on dira plutôt : pour maintenir, au 
>> besoin par la force, la suprématie de l'Occident.
>>
>> 	Cette longue faille horizontale est-elle destinée à s'élargir 
>> irrémédiablement, ou bien peut-elle encore se réduire, se résorber, 
>> pour que l'on recommence à construire des passerelles ?
>>
>> 	On a peut-être encore une chance d'accomplir, dans le cadre 
>> européen, ce qu'on n'a pas su accomplir depuis des siècles au niveau 
>> planétaire, à savoir : montrer par l'exemple que l'Occident est prêt 
>> à appliquer aux autres les principes qu'il a édictés pour lui-même, 
>> afin qu'il puisse reconquérir sa crédibilité morale. La crédibilité 
>> morale est, dans le monde d'aujourd'hui, la denrée la plus rare. 
>> L'Occident en a de moins en moins, et ses adversaires n'en ont pas. 
>> Tenter de restaurer sa crédibilité morale sur toute l'étendue de la 
>> planète serait une tâche titanesque, mais il n'est pas insensé de 
>> chercher à la restaurer au sein de nos sociétés, le seul lieu où la 
>> diversité du monde demeure à peu près gérable. Pour cela, il faudrait 
>> faire en sorte que les personnes qui ont choisi de vivre dans les 
>> pays d'Occident puissent s'identifier pleinement à leur société 
>> d'adoption, à ses institutions, à ses valeurs, à sa langue, et même à 
>> son histoire. Qu'ils ne soient pas constamment en butte aux 
>> discriminations et aux préjugés culturels. Qu'ils puissent 
>> revendiquer, la tête haute, leur identité plurielle au lieu d'être 
>> contraints à un choix déchirant et néfaste entre leur culture natale 
>> et leur culture d'adoption. Qu'ils puissent enfin jouer leur rôle de 
>> passerelles de civilisation, pour réhabiliter leurs sociétés 
>> d'origine aux yeux de l'Occident, et aussi pour réhabiliter 
>> l'Occident.
>>
>> 	La tentation de s'enfermer dans une citadelle est compréhensible, 
>> surtout à une époque où les périls sont grands et où le besoin de se 
>> protéger est réel. Mais il me semble que c'est justement à ce 
>> carrefour dangereux de l'Histoire qu'il faudrait proposer à tous, aux 
>> peuples d'Europe comme aux populations venues d'ailleurs, un nouveau 
>> contrat social, un contrat de coexistence qui permette de guérir, peu 
>> à peu, les blessures du temps. C'est ce que l'Europe moderne a su 
>> faire pour ses propres blessures, et c'est ce qu'elle peut et doit 
>> apporter aujourd'hui à notre humanité déboussolée.
>>
>> 	Aucune action ne me paraît plus importante. Ni plus urgente, parce 
>> qu'il est déjà presque trop tard.
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>> 	Amin Maalouf
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