[LCM Articles] Le Devoir: La tentative d'hégémonie américaine au Moyen-Orient

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Wed Jul 25 05:20:45 EDT 2007


Le Devoir: La tentative d'hégémonie américaine au Moyen-Orient

Mardi 24 juillet 2007.
Hoda Asmar, Historienne, membre de Tadamon! Montreal.

http://tadamon.resist.ca/index.php/post/789

Le 20 juillet, dans les colonnes du Devoir, M. Attali, consul général d'Israël 
à Montréal, pose la question suivante: «Quel est le point commun entre les 
nombreuses turbulences que traverse le Moyen-Orient actuellement, qu'il 
s'agisse de la prise de contrôle de la bande de Gaza par le Hamas, de la lutte 
pour le pouvoir du Hezbollah au Liban, de l'agitation qui secoue l'Irak ou de 
l'acquisition prochaine de l'arme nucléaire par une dictature radicale? La 
réponse est l'Iran.» En réalité, cette réponse serait plutôt: les États-Unis. 
Lorsqu'on connaît les projets américains de «nouveau Moyen-Orient», agiter la 
«menace iranienne» constitue une stratégie de diversion qui ne résiste pas à 
l'examen des faits.

Premièrement, l'Iran n'est pas responsable de l'attaque américaine en Irak. 
Rappelons que, après la Révolution islamique de 1979, celle-ci risquant de se 
répandre à l'Irak, Saddam Hussein avait lancé une guerre sanglante contre le 
nouveau régime iranien. La guerre Iran-Irak, qui a duré huit ans (1980-1988) et 
a fait environ un million de morts, a été soutenue par les puissances 
occidentales, États-Unis en tête, qui armaient sans vergogne le régime 
dictatorial d'un Saddam qu'ils anéantiront un peu plus tard. Que le régime 
iranien, en tant que voisin, joue un rôle dans la guerre en Irak est une 
évidence, mais dire que «l'agitation» (qualifier 650 000 morts irakiens 
«d'agitation» est quelque peu troublant) vient de l'Iran ajoute la 
désinformation à l'euphémisme. Rappelons encore une fois que ce sont les 
États-Unis de Georges Bush avec leurs alliés qui ont attaqué l'Irak sous le 
prétexte de la présence menaçante d'armes de destruction massive (qui 
n'existaient pas, faut-il également le rappeler?).

Deuxièmement, les conflits qui secouent la Palestine actuellement sont, là 
encore, liés aux États-Unis (et bien évidemment à Israël). Lors d'élections 
reconnues comme démocratiques par la communauté internationale en janvier 2006, 
le Hamas a obtenu la majorité des suffrages dans les territoires palestiniens 
toujours occupés par Israël. Ouvertement, les États-Unis ont fait savoir qu'ils 
ne reconnaîtraient que le Fatah (le parti minoritaire) et qu'ils continueraient 
à le soutenir (comme ils avaient financé sa campagne électorale). Et si de 
nombreux Palestiniens ont voté pour le Hamas, c'est également pour exprimer 
leur opposition à cette ingérence impérialiste étrangère (étant donné leur 
histoire, les Palestiniens peuvent difficilement voter pour un parti soutenu 
par les Américains.).

Troisièmement, le Hezbollah. Là encore, le consul d'Israël réécrit l'histoire: 
«L'agression du Hezbollah contre Israël en 2006 a provoqué un affrontement 
majeur. Sans l'appui logistique et idéologique de l'Iran, jamais le Hezbollah 
n'aurait osé cette confrontation voulue par Téhéran.» Monsieur le consul 
ignore-t-il que son propre premier ministre, Éhoud Olmert, a reconnu 
publiquement que la guerre, déclenchée par Israël, était planifiée depuis des 
mois? Devant une commission d'enquête officielle, M. Olmert a affirmé que sa 
décision de riposter à l'enlèvement de soldats par une vaste opération 
militaire a été prise dès mars 2006, quatre mois avant que n'éclate la guerre 
au Liban (Haaretz, 8 mars 2007). Alors que les Libanais commémoraient ce 12 
juillet le premier anniversaire du début de cette attaque israélienne qui a 
fait plus de 1100 morts civils (dont un tiers d'enfants) côté libanais, alors 
qu'Israël poursuit des exactions quotidiennes en Palestine et continue à 
construire un mur de la honte au mépris de toutes les résolutions 
internationales, accuser l'Iran d'être l'instigateur d'une «agression» contre 
Israël est un peu fort!

En outre, le consul d'Israël accuse le Hezbollah de vouloir «prendre le 
contrôle du Liban». En réalité, les élus du Hezbollah (parti politique légitime 
au Liban, qui participe aux élections) se sont retirés du gouvernement pour 
réclamer davantage de représentativité. Depuis la fin 2006, ils n'ont donc plus 
aucun portefeuille ministériel et ont rejoint l'opposition (composée d'une 
dizaine de partis) qui réclame (pacifiquement) des changements politiques. La 
coalition restée au pouvoir, soutenue là encore par les États-Unis et les 
puissances occidentales, continue donc de diriger le pays. Dans les faits, bien 
que le Hezbollah soit en partie financé par l'Iran, affirmer qu'il tente de 
«prendre le contrôle du Liban» est totalement infondé (il n'y a eu ni coup 
d'État ni agression interne qui puisse être attribuée au Hezbollah dans cette 
bataille politique).

Il est évident que l'Iran joue un rôle majeur dans la politique au 
Moyen-Orient. C'est un grand pays, une puissance régionale et, en effet, un 
régime contestable pour de nombreux aspects de ses politiques intérieures et 
extérieures. Néanmoins, les puissances qui sont responsables, dans les faits, 
de déstabiliser la région sont les États-Unis et Israël (guerres contre l'Irak 
et l'Afghanistan, attaques militaires contre le Liban et occupation des 
territoires palestiniens). En outre, venant de représentants politiques 
israéliens dont l'État a mis en place une politique d'apartheid, qui ne se 
cache plus de posséder l'arme nucléaire, qui est accusé de crimes de guerre par 
de nombreuses enquêtes au Liban comme en Palestine et qui viole plus de 70 
résolutions onusiennes, ces accusations contre «l'axe du mal iranien» font 
grincer des dents.

Le soutien inconditionnel des États-Unis à Israël n'est un secret pour 
personne, et les visées américaines au Moyen-Orient non plus. Ces discours de 
diabolisation de l'Iran sont particulièrement dangereux car ils préparent le 
terrain à une future attaque contre ce pays, attaque dont les conséquences 
cette fois ne seront pas régionales mais bien mondiales. Le fait que les 
néoconservateurs américains ne semblent pas exclure une guerre contre l'Iran, 
que le régime israélien pourrait encourager, constitue la réelle menace qui 
pèse aujourd'hui sur le Moyen-Orient.

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